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20 septembre 2018 4 20 /09 /septembre /2018 20:10

A côté du moindre cauchemar, un enfer réel aurait quelque chose de rassurant; mais l'enfer n'est ni réel ni à côté.

Dans le rêve, la terreur réveille; dans la réalité aussi.

S'il fallait reprocher quelque chose à "la religion", ce serait d'avoir subtilisé à l'homme son bien le plus précieux et le plus assuré, la certitude de sa mort; non seulement pour la risquer en spéculations incertaines, mais pour la lui rapporter en dividendes d'incertitude, selon une économie durable d'investissement et d'asservissement, sous le régime de la carotte et du bâton. Ce serait toutefois oublier que ladite "religion" ne fut qu'un jeu de masques de l'homme, et qu'il lui fallait payer ce prix d'aliénation exorbitant pour se l'approprier et l'apprécier précisément comme son bien, le seul inaliénable.

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19 septembre 2018 3 19 /09 /septembre /2018 09:38

A la différence d'autres idéologies, le nihilisme serait une position d'arrière-garde dans un combat gagné d'avance.

Vivre avec son dieu, mourir sans lui, voilà qui peut s'entendre de bien des manières, de l'alternative tautologique à l'unité paradoxale -- où l'indécidable se décide d'un coup, du tranchant de l'âme.

Pour réconcilier Nietzsche et Cioran, Dieu n'est pas mort sans un chant de cygne baroque.

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18 septembre 2018 2 18 /09 /septembre /2018 13:22

Tissent le désir et la peur ennemis jusqu'à ce qu'ils se lassent et contemplent, épuisés, apaisés, satisfaits et complices, leur commun ouvrage.

Ta mort s'arrondit, s'alourdit, se dore et craquèle comme le fruit mûr de ta vie, bon à cueillir.

Divin, humain, bovin, ovin, caprin, reptilien, félin, canin, Caïn, tout œil te regarde de ton propre regard; du fond sans fond, inamovible et toujours déplacé, où enfin tu te reconnais.

Je pense, donc je suis -- quoi ? le point de vue aberrant où tout se fait horreur et merveille absolue, conspiration divino-diabolique universelle, dont nulle présence ne s'éloigne et où nul instant ne passe qu'en fraude. Point de métaphysique sans paranoïa.

 

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16 septembre 2018 7 16 /09 /septembre /2018 11:31

Âme fugitive, essentiellement fugitive, d'en-deçà et au-delà de toi-même, toutes les disciplines qui t'ont formée en te formant un corps, un cœur, un cours, t'auront d'abord été obstacles et contrariétés: celles que tu as surmontées comme celles que tu as évitées, celles que tu as passées comme celles où tu as échoué, celles que tu as désertées comme celles où tu as persévéré: parents, famille, manières, langage, conventions, propreté, santé, maladie, accidents, souffrances, jouissances; écoles privée, publique ou buissonnière, classes et cours de récréation, jeux, sports et combats, écriture, calcul, grammaire et leçon de choses, religion, langues et littératures, sciences et techniques, philosophie, droit, économie, politique, discours, textes, corpus, sexe, genre, profession, entreprise, Etat, espèce; par et entre quoi tu as cependant tracé ton chemin, le plus fortuit et le plus nécessaire, ta ligne de fuite, ta ligne de chance et ta ligne de vie, la plus courte et la plus tortueuse, la plus longue et la plus directe, par définition.

(En mémoire d'Hadrien et de tant d'autres.)

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15 septembre 2018 6 15 /09 /septembre /2018 21:27

Il aurait été si peu de son temps, de son pays et de son monde que c'en serait risible. Pourtant il l'aurait été de part en part, comme n'importe qui, ne fût-ce que par le goût et par la langue.

L'esprit, le vent, soufflait où il voulait, quand  et comme il voulait, mais rarement avec la résolution lumineuse d'un siècle de Périclès ou d'une Renaissance toscane, ni à l'allure allemande qui en quelques décennies avait emporté la musique européenne de l'ascension baroque au déclin romantique. La suite le montrerait non moins spectaculaire, mais plus mauvais.

La prospérité honteuse et grise d'un après-guerre français avait explosé en une gerbe de rythmes et de couleurs sauvages, vite retombée selon les lois d'une économie désormais sans illusion d'autre; celle-ci n'en finirait plus d'étouffer la vie, animale, végétale, minérale, de son humanité conditionnée, fascinée de toutes les formes et les couleurs de ses polices bienveillantes ; trop lentement, trop sûrement. L'an 2000, le XXIe siècle, ni spatial ni spirituel mais mondial et communicatif, d'autant plus bavard qu'il n'a plus rien à dire. Sa malédiction et sa plus grande chance, peut-être, de n'avoir rien à dire; de le savoir et de ne plus pouvoir le taire. Mais il ne voyait rien venir, sinon l'éternité particulière de cet automne.

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12 septembre 2018 3 12 /09 /septembre /2018 09:22

au bord du trottoir, de la falaise, du précipice, de la folie, de la tombe, où la marge marque et la périphérie prolifère, où l'autre altère et où la différence diffère; où l'on voit et où l'on respire, et où l'on se retient quand même en vain, un pied dedans, un pied dehors, de crainte de tomber, moins dehors qu'en un autre dedans, où il faudrait à nouveau jouer des coudes pour gagner un autre bord.

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11 septembre 2018 2 11 /09 /septembre /2018 21:35

L'homme n'a jamais cessé d'être animal; il n'a pas non plus fini de le devenir.

Naguère il inventait ses dieux comme le cochon trouvait ses truffes. Aujourd'hui il se contente de plus fade et de plus sûr. Mais demain ?

(En lisant Mille plateaux, de Deleuze & Guattari, avec près de quarante ans de retard.) Rien de plus décevant qu'une prophétie réalisée: la pensée réticulaire et fractale du "rhizome", désormais incarnée dans la fausse virtualité du worldwide web et des social networks, s'est vue confirmée au-delà de toute espérance et dépouillée de tout enthousiasme libertaire. Dépourvue de transcendance verticale, d'autorité, d'archéologie, de généalogie, de racines et d'arborescence, l'aliénation désormais immanente et horizontale s'étend à perte de vue.

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9 septembre 2018 7 09 /09 /septembre /2018 10:00

L'homme sans dieu -- d'abord monothéiste, puis athée -- n'en aura pas moins été l'œuvre des dieux, le fruit mûr, brillant et vite pourri de leur automne. Et par là, peut-être, la promesse d'un autre printemps, ni dieu ni homme et pourtant le commun rejeton de leur rejet mutuel; mais l'hiver sera long.

Le bien qui s'oppose au mal dépendrait trop de celui-ci pour le vaincre jamais, s'il n'y avait là une ruse de guerre -- la ruse de la guerre même, qui se joue de ses objecteurs de conscience autant que de ses combattants. Y compris de ces objecteurs de conscience au second degré qui, l'ayant trop bien compris, objectent à toute conscience.

Πόλεμος πάντων μὲν πατήρ ἐστι, πάντων δὲ βασιλεύς, καὶ τοὺς μὲν θεοὺς ἔδειξε τοὺς δὲ ἀνθρώπους, τοὺς μὲν δούλους ἐποίησε τοὺς δὲ ἐλευθέρους. (Héraclite, 53)

Ἐγὼ δὲ λέγω ὑμῖν μὴ ἀντιστῆναι τῷ πονηρῷ  (Evangile selon saint Matthieu, v, 39)

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8 septembre 2018 6 08 /09 /septembre /2018 10:40

Esprit vivant des morts

singulier innombrable qui

depuis qu'on dit toujours

devises, divises, divinises

de toutes tes figures

visages, museaux, gueules,

ombres, contours, surfaces

de l'être protéiforme

où pouvais-tu paraître

sinon sous l'espèce

symptomatique

du cadavre universel ?

 

Il fallait en effet

que ce mort-là

en son exhibition mondiale

monstrueuse admirable

fût homme et dieu

et femme et diable

mortel immortel

animal végétal minéral idéal

Yahvé pourquoi pas

mais aussi El, Baal, Anat et Yam,

Rê, Isis, Osiris et Seth,

Zeus, Aphrodite, Apollon, Dionysos,

Orphée, Héraklès, Prométhée, Cronos,

et même Brahma, Kali, Krishna...

 

Ne le reconnaissez-vous pas ?

 

κἀγὼ ἐὰν ὑψωθῶ ἐκ τῆς γῆς πάντας ἑλκύσω πρὸς ἐμαυτόν (Evangile selon saint Jean, xii, 32).

Et, par exemple, ceci.

 

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7 septembre 2018 5 07 /09 /septembre /2018 21:41

Pas de mort, sans doute, qui ne signifie au vivant, par-delà la terreur, la rage et la tristesse, la proximité constante de son altérité paisible et simple, à la fois inaccessible et d'accès garanti. Mais celle d'un enfant, à peine né ou à ne pas naître, nommé ou pas encore, effleure l'existence et la mémoire des siens avec la délicatesse d'une aile d'ange, tel l'acte d'une virtualité pure et cependant toute corporelle. Moins l'on se souvient de lui, moins on l'oubliera.

Tout juste ce qu'à un dieu il faudrait d'incarnation pour ne pas passer inaperçu.

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