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5 juillet 2023 3 05 /07 /juillet /2023 10:51

Quand on ne voit plus autour de soi que perles et pourceaux, il est grand temps d'être déchiré; on n'en aura pas moins goûté le spectacle, et c'est encore pour les seconds qu'on gardera le plus de tendresse.

L'intellection, mirage des sens, n'est pas une demeure habitable, mais le risque abrupt et la chance escarpée de l'éclair et de la transfiguration, l'espace d'un instant où il n'y a plus ni soi ni autre, ni visage ni paysage.

Quelque reconnaissance qu'on en ait, nul ne pardonnerait à quiconque de l'avoir, en l'appelant ou en l'interpellant, rappelé à lui-même.

Vouloir être dieu, c'est encore manquer d'ambition.

De l'inconvénient d'être soi, l'unique avantage serait de n'avoir jamais affaire à soi comme à un autre.

Duplicité et imposture foncières de l'autonomie, de l'autarcie, de l'encratisme: qui légiférerait pour qui, qui suffirait à qui, qui maîtriserait qui ?

L'être -- tout être -- diffère parce qu'il rayonne et résonne, résonne et rayonne parce qu'il diffère de lui-même, en plus d'un sens; sans ténèbres pas de lumière, sans silence pas de son, et inversement, mais cela ne fera jamais une équivalence, ni une symétrie, ni une indifférence.

L'extinction des sens, tels la mer ou le jour en leur retrait, laisse un savoir qui ne se distingue plus de l'être, un et infiniment divers: Héraclite et Parménide morts de rire sur la plage désertée.

Quoi de plus con que d'être contre, sinon d'être pour ?

Années de malheur, heures de bonheur, minutes d'effroi, frissons de joie. (Cherchez l'erreur.)

Rien ne justifierait autant le pessimisme que l'optimisme -- et inversement, hélas.

Tout le monde sait qu'il va mourir, et personne ne le sait; de fait chacun mourra et nul n'est jamais mort. Mais c'est justement celui qui le sait qui ne meurt pas et celui qui ne le sait pas qui meurt.

Tous les chemins mènent à mort -- où personne n'arrive.

La conscience est le comble et la condition même de l'illusion.

De l'oeuvre ou de la vie la plus riche, comme de la plus indigente, on ne retiendrait que quelques traits, phrases, séquences, passages, enchaînements, qui détachés les uns des autres poursuivent leur course erratique, tout seuls ou combinés à d'autres, en tout cas méconnaissables. Retombe dans le secret, ou dans l'oubli, la forme unique qu'ils dessinaient ensemble, dans un ultime regard en arrière, au bout du chemin qu'ils avaient tracé.

Tant qu'il y a des moutons, il y aura des chiens et des loups; dussent bien des chiens redevenir loups.

Toute l'intelligence du monde dans une goutte d'eau qui trouve sûrement son chemin vers le ruisseau, la rivière, le fleuve, le lac, la mer ou la source.

Une bulle en crevant jamais n'abolira l'océan.

Entre le rien et le mal il n'y a jamais eu le moindre choix.

On ne quitte pas l'humanité, pas même les pieds devant; on ne ferait que la prolonger ou l'élargir, l'élever ou l'approfondir, sans cesser de l'appesantir.

Toute oeuvre digne de ce nom est posthume et anonyme, fût-ce sous un nom propre et illustre; ainsi le veut le secret, ou la discrétion, de sa propriété.

Le nombre à lui seul a changé le signe, retourné le positif en négatif et le négatif en positif, le bien en mal et le mal en bien, dans le dos de tous les discoureurs, qui seront les derniers à s'en apercevoir.

Les mots aussi retombent en poussière, et tous les discours retournent au silence, qui ne se demande même pas s'il en serait changé.

Ecriture des morts, plus vivante que la parole des vivants.

Je te suis, tu m'es.

Âme animale et nue, hurlements, gémissements, halètements, silence enfin de chien perdu, sans la voix de l'enfant.

Désir et plaisir diurnes de croire savoir et comprendre, contre la vérité obscure qui chaque nuit fait craquer combles, caves, planchers, plafonds, portes, volets et couloirs.

One is a crowd.

L'on ou l'ombre de l'un.

Bonne ou mauvaise nouvelle ? L'enfer est supportable.

La mort et la vie éternelle(s) sont encore synonymes en ceci qu'elles libèrent, délivrent ou dégagent de l'avenir -- jusque dans l'ambiguïté abyssale d'une telle syntaxe.

Au bonheur et au malheur le nombre n'ajoute ni ne soustrait, ne multiplie ni ne divise.

Mon amour              masculin féminin singulier innombrable
                     perdu
                     brisé
                     arraché
                     disloqué
                     dispersé
                     piétiné
                     enfoui
                     oublié
                                 retrouvé
                                                un
                                                sauf
                                                vivant
                                                intact
                                                intègre
                                                indemne

Tout est vanité : tout est grâce.
Tout est faux : tout est vrai.
Tout est souffrance : tout est joie.

De toutes ses larmes,
                                  de peine,
                                  de chagrin,
                                  de douleur, 
                                  de dépit,
                                  de rage,
                                  de rire,
                                  de joie,
                                  de crocodile
la mer a recouvert l'ultime crête : adieu la part des choses.

Un monologue est encore un dialogue de sourds.

                   
                    
 

 

 

 

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