http://oudenologia.over-blog.com/article-esoterique-de-l-obscurantisme-114771690.html
il fallait aux hommes comme aux dieux
des ténèbres
épaisses palpables
matérielles maternelles
ambiguës équivoques
indécises indécidables
des trous des plis des replis vagins matrices
des forêts des cavernes des grottes
tempérées humides douces l'hiver fraîches l'été
des maisons des toits des murs des prisons
des temples des sanctuaires des églises des sacristies obscures
des chambres des cellules des cachots
des portes des fenêtres des rideaux des voiles
de l'architecture et de la moisissure
des secrets des mystères des arcanes
pour se replier se cacher se dissimuler
s'abriter se protéger se préserver se réserver
se ressourcer se renouveler se régénérer
dormir rêver inventer songes et mensonges
croupir pourrir mourir aussi
ô fanatiques de la lumière et de la transparence
du solaire et du sanitaire
de la veille et de la conscience
qui avec vous nous désséchâtes commes limaces au soleil
que vous vous connaissiez mal !
*
* *
Le doute-hésitation, (dia-)critique par excellence (le dia-krinomai du Nouveau Testament, à la voix moyenne-passive, dont je n'avais pas signalé précédemment qu'il semble être une trouvaille linguistique des "premiers chrétiens", cet usage du verbe n'étant attesté ni avant, ni ailleurs que dans des écrits "chrétiens"), où selon une syntaxe un tantinet désuète on doute ou on hésite si (ob, whether), face à ce qui se présente comme alternative (au moins) binaire, bifurcation, patte d'oie, droite ou gauche, haut ou bas, ici ou là, oui ou non, bien ou mal, qu'il s'agisse de dire, de faire ou singulièrement de croire ou pas, exigeant choix et décision aussi indécidable soit-elle, arrêtant et paralysant tel le sphinx celui qui arrivé là ne parvient pas à se décider, le divisant en retour à sa ressemblance (diakrinomenoV = diyucoV, dit conformément au sens premier du verbe l'épître de saint Jacques: celui qui doute-hésite, littéralement est divisé, le voilà ipso facto "double-d'âme", duplice à l'image de la dualité qu'il envisage et qui le dévisage -- cela pourrait bien occuper aussi entre foi et foi, foi prétendument d'en-deçà et d'au-delà du doute, la position faussement médiane et médiatrice du miroir. Par rapport à l'aporie immobilisante du doute, le prétendu pas (ou saut) de la foi au-delà du doute serait aussi une régression en-deçà du doute et de l'alternative. Il consisterait moins à choisir une option contre l'autre (ou parmi d'autres), comme dans le modèle du pari, qu'à récuser, réfuter ou refuser (comme le cheval refusant l'obstacle) l'alternative et, partant, le choix. Non en suspendant celui-ci (sur le mode du scepticisme ou de l'agnosticisme qui s'installent plus ou moins confortablement devant ou dans l'alternative), mais en s'en détournant et en s'en écartant, ne fût-ce que pour le contourner. La prétendue victoire de la foi sur le doute est alors peu glorieuse, sûrement pas héroïque: c'est aussi une retraite et un repli; elle n'aura passé son chemin qu'en rebroussant chemin, si imperceptible que soit le recul nécessaire à l'écart.
Reste sans doute (!) une différence qualitative, subtile, de modestie peut-être, entre la foi qui a connu l'épreuve du doute et celle qui ne l'a pas (encore) connue. Différence à peine consciente, dans la mesure où ce n'est pas une autre foi, où pour croire encore de la même foi il lui aura fallu oublier le doute. Elle sait quand même, au fond d'elle-même, qu'elle dépend d'un certain lieu et qu'à le quitter elle se perd.
[Je me suis plusieurs fois référé à un mot attribué à Bismarck que j'avais trouvé extrêmement profond -- je ne sais plus où je l'avais lu, et je n'en retrouve sur le net qu'une version anglaise, rien en allemand, ce qui n'est pas très bon signe quant à son authenticité. Cela donnait à peu près: "Il n'y a qu'une folie pire que celle du fou qui dit en son cœur: 'Il n'y a point de Dieu" (cf. Psaume xiv, 1], c'est celle du peuple qui dit avec sa tête qu'il ne sait pas s'il y a un Dieu ou non."]