Blindenleiter

Que la science, la technique et le journalisme ne pensent pas, Heidegger l'a dit et redit, avant de s'apercevoir et après s'être aperçu que les politiques -- nazis pour commencer -- ne pensaient pas non plus; et les philosophes pas davantage, si ce qui (leur) donne le plus à penser c'est que nous ne pensons pas encore.

Qui sait si la ronde des guides aveugles (Führer, etc.) se suivant les uns les autres, de biologie en médecine, de médias en opinions publiques et en décideurs politiques, ne finira pas par donner le tournis au point de dessiller ici et là quelques yeux, fussent-ils borgnes, sur la seule qui donne à penser, et à chacun quand elle lui arrive, inconnue et impensée, la vie la mort.

En attendant les aveugles commandent et entendent être obéis. Pas question d'en laisser un se perdre tout seul.

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Dans l'économie générale, politique, sociale et professionnelle, dans la division du travail et la distribution des fonctions, personne n'était prévu, formé, payé, reconnu et écouté pour se demander SI. S'il était raisonnable et souhaitable de laisser la population humaine quadrupler en un siècle, de prolonger "l'espérance de vie" de générations successives jusqu'à l'extrême vieillesse, d'élever le "niveau de vie" de sociétés entières par la croissance de la production et de la consommation -- tout cela allait de soi, par un enchaînement de causes et de conséquences toujours accompagné des meilleures intentions, chrétiennes, humanistes, de droite et de gauche. Non que personne n'en ait douté, en son for intérieur et même bruyamment, mais aucun doute, aucune contestation ni action politique n'était de nature à enrayer le "progrès" et le "développement", comme "événements" inéluctables d'abord, comme "idéologies" accessoires ensuite: on n'arrête pas le progrès, c'était encore un fatalisme.